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Œuvre de la semaine : Alexander Goehr – Verschwindendes Wort

Les 25 et 26 novembre ont lieu les deux premières exécutions respectivement en Angleterre puis en Allemagne de l'œuvre d'Alexander Goehr Verschwindendes Wort (que l'on pourrait traduire par "Le mot disparaissant"). L'Ensemble Modern sera l'interprète de l'œuvre au Wigmore Hall de Londres, et, le lendemain, à l'Alte Oper de Francfort. Lucy Schaufer et Christopher Gillet prêtent leur voix aux "mots disparaissant".

Verschwindendes Wort est un cycle mixte constitué de Lieder, duos et pièces instrumentales pour mezzosoprano, ténor et ensemble instrumental. Composé d'abord, en 2013, pour deux voix et piano, il fit en 2015 l'objet d'une instrumentation. Verschwindendes Wort est consacré à l'aspect polysémique des mots et en même temps à la désaffection de l'homme envers la nature. Alexander Goehr met en musique sept textes de six auteurs différents, parmi lesquels Jakob Böhme, Rainer Maria Rilke et Ingeborg Bachmann, qui ont chacun contribué à ouvrir différentes perspectives au problème de la signification et de l'intelligibilité. Entre les mouvements chantés, cinq préludes instrumentaux offrent aux mots une opportunité de s'y glisser pour disparaître.

Verschwindendes Wort d'Alexander Goehr – Signification de la signification


Verschwindendes Wort commence par l'image de l'arbre du langage tel que le mystique allemand Jakob Böhme se le représentait  au début du XVIIe siècle : au fur et à mesure de sa croissance et de sa diversification, la langue universelle de la nature se sépara en de multiples langues plus faibles. Dans le deuxième chant, Goehr met en musique l'histoire d'Adam qui se vit chargé par Dieu de donner à chaque animal le nom qui lui revenait. Dans les mouvements suivants, les poèmes reflètent chacun à sa manière les différents modes de relation aux mots. Ces textes éveillèrent l'attention de Goehr au moment où il travaillait au cycle pour baryton TurmMusik. Cette œuvre, qui s'inspire de l'histoire de la construction de la tour de Babel, est donc en étroite parenté thématique avec Verschwindendes Wort.

Verschwindendes Wort fut créé le 22 janvier 2016 à New York. Le cycle, d'une durée de 35 minutes, y reçut de grandes louanges pour la combinaison de mystique et de transparence qui le caractérise.
Le sentiment que je veux éveiller est celui de la transparence : l'auditeur doit, dans les dimensions tant successives que simultanées de la partition, distinguer l'ancien sous le nouveau et le nouveau à partir de l'ancien. – Alexander Goehr

Outre Verschwindendes Wort, l'Ensemble Modern donne en création, dans les concerts de Londres et de Francfort, deux autres nouvelles œuvres d'Alexander Goehr, qui viennent compléter la Manere I de 2008 de manière à former un triptyque : à Manere II, pour clarinette et cor, succède Manere III, dans laquelle un violon vient transformer l'effectif en trio. Le mot Manere désigne, dans les chorals grégoriens, une sorte de mélisme couramment employé jusqu'au XIVe siècle, pour généralement disparaître ensuite.

Œuvre de la semaine – Thomas Larcher : Symphony No. 2

Le 28 août est la date de la première exécution au Royaume–Uni de la  Symphonie No. 2 'Kenotaph' (2e Symphonie "Cénotaphe") de Thomas Larcher, dans le cadre des concerts-promenades de la BBC (BBC Proms) de Londres, jouée par l'Orchestre symphonique de la BBC placé sous la direction de Semyon Bychkov. Bychkov, à qui la symphonie est dédiée, a dirigé la première mondiale de l'œuvre avec les musiciens de l'Orchestre philharmonique de Vienne le 3 juin de cette année, à Vienne.

Alors que ses premières compositions s'étaient tout d'abord nourries de tout le poids de son expérience en tant que musicien de chambre, Larcher s'est peu à peu aventuré dans l'écriture pour des orchestres plus fournis, en commençant en 2010 par Red and Green (Rouge et vert). Cette pièce servit ensuite de base de travail à la création de sa première symphonie Alle Tage (Tous les jours) pour baryton et orchestre (2010–2015), qui fit suite au succès obtenu par A Padmore Cycle (Un Cycle pour Padmore) pour ténor et orchestre, en 2014.

Symphony No. 2  -  "Un tombeau pour les âmes oubliées et perdues"


Symphony No. 2 est une pièce de 35 minutes, une symphonie en quatre mouvements, qui conserve de fait, par endroits, la sonorité plus intime de ce qui était envisagé au départ – un concerto pour orchestre. Écrite pour un orchestre en grand effectif avec un important pupitre de percussions, la composition de Larcher parcourt différents niveaux d'énergie musicale, afin de rechercher une teneur et une structuration certes exploratoires, mais en parfaite connaissance des traditions et des formes classiques. Le sous-titre de la symphonie, "Cénotaphe", fait allusion à des monuments érigés pour la commémoration de personnes tuées à la guerre, ou, selon les propres mots du compositeur, "des tombeaux pour les âmes oubliées et perdues". Dans l'angoisse due à la continuation en Europe de la crise des migrations de populations, en particulier, Larcher transmet son sentiment dans cette œuvre.
"Des milliers et des milliers de gens se sont noyés en Méditerranée pendant qu'en Europe, tout le monde restait sur les côtés sans rien faire, se contentant d'observer la tragédie ou même de détourner le regard. [Cette symphonie] est le symbole de ce qui s'est passé et qui se passe toujours en plein centre de l'Europe". – Thomas Larcher

Les exécutions d'œuvres de Larcher, dans les prochains mois, comprennent Ouroboros, pour violoncelle et orchestre de chambre, par l'orchestre de chambre de Norvège le 13 septembre à Oslo, avec le violoncelliste Jean–Guihen Queyras et le chef Per Kristian Skalstad, et la même pièce le 13 octobre à Salford (Royaume–Uni) avec l'orchestre philharmonique de la BBC, le violoncelliste Matthew Barley et le chef Ben Gernon, en première audition dans ce pays. Le 6 octobre, à Bergen (Norvège), Edward Gardner dirigera A Padmore Cycle avec le ténor Mark Padmore et le Philharmonique de Bergen. Le Tonkünstler–Orchester Niederösterreich, sous la direction de Yutaka Sado, interprétera Red and Green en Autriche les 7 (Vienne), 8 (Grafenegg) et 9 octobre (Vienne).

Œuvre de la semaine - Sir Peter Maxwell Davies: The Hogboon

L'opéra pour enfants The Hogboon de Sir Peter Maxwell Davies, compositeur disparu il y a trois mois, sera créé le 26 juin 2016 au Barbican Hall de Londres. Au pupitre, Simon Rattle dirige le London Symphony Orchestra et les musiciens de la Guildhall School, ainsi que les chanteurs du LSO Discovery Choir et du London Symphony Chorus.



L'argument du Hogboon est tiré d'un conte populaire écossais des Orcades, où Peter Maxwell Davies a vécu ces 40 dernières années. Dans la fosse et sur la scène de cet opéra pour enfants jouent ensemble des musiciens professionnels, des étudiants et des enfants. Dans la pièce, Magnus, le septième fils d'un septième fils, est raillé par ses frères parce qu'il refuse d'aider aux travaux de la ferme. Mais Magnus reçoit l'occasion de faire ses preuves : le monstre marin Nuckleavee menace de détruire le village si on ne lui donne pas pour nourriture six jeunes femmes ainsi que la princesse. Avec l'aide du gentil lutin, le Hogboon, Magnus met au point un plan destiné à chasser Nuckleavee et à sauver les femmes et le village.

Sir Peter Maxwell Davies : The Hogboon – Un opéra pour enfants d'un genre particulier


L'œuvre de Maxwell Davies comprend des pièces de tous genres et de diverses sortes de styles. C'est ainsi qu'il put toucher autant de cercles de publics différents, comme peu d'autres compositeurs en ont été capables. Il sut être innovant jusqu'au domaine de la pédagogie musicale même : enseignant à l'établissement d'enseignement secondaire de Cirencester, il développa une méthode personnelle d'enseignement de type néo-socratique. Il composa aussi bien des pièces pour le théâtre musical d'enfants que, par exemple, les opéras-pantomimesCinderella (Cendrillon) ou The Rainbow (L'arc-en-ciel), ou encore les cycles de mélodies Kirkwall Shopping Songs et les Songs of Hoy. Voici comment Maxwell Davies décrit sa démarche dans la composition d'opéras pour enfants :
Les enfants n'ont ni inhibitions ni préjugés. Ils n'en savent pas assez sur la musique pour la classifier. Ils abordent les choses avec fraîcheur et on doit seulement bien maîtriser cet exercice de corde raide que représente l'écriture d'une musique qui tienne leur intérêt en éveil du début à la fin d'une répétition. D'un autre côté, elle ne doit pas non plus trop exiger d'eux, ce qui les découragerait. Une musique qui traite de choses suscitant un intérêt immédiat et naturel chez les enfants, et qui, dans la mesure du possible, procure des sentiments de découverte, de performance et de plaisir. – Maxwell Davies

En souvenir de Maxwell Davies a lieu le 27 juin 2016, au St John Smith's Square de Londres, un concert au cours duquel sera créé le String Quartet Movement 2016 (Mouvement pour quatuor à cordes 2016). En outre, on pourra également entendre d'autres œuvres de lui, parmi lesquelles son œuvre pour chœur et orgue The Golden Solstice (Le Solstice d'Or). Le 12 novembre, le Jugend-Musik-Ensemble interprétera la pièce pour orchestre 5 Voluntaries. La première audition du Hogboon à Luxembourg est prévue en mai 2017, par l'Orchestre philharmonique du Luxembourg.