Œuvre de la semaine – György Ligeti : Concerto pour piano et orchestre
- 7 mai 2019
C’est à peu près au même moment que le Concerto pour piano que Ligeti entreprit dans les années 1980 son travail sur les Études pour piano, qui proposent une refondation nouvelle des possibilités sonores et techniques du piano. Cette refondation se retrouve dans les deux œuvres, proches l’une de l’autre tant sur le plan de la technque de jeu que sur celui de la composition musicale. L’une de ces possibilités nouvelles consiste à créer une succession de très courtes notes différentes jouées dans un tempo très rapide, constituant ainsi un tissu sonore stable, planant, pour ainsi dire. Dans le Concerto pour piano, c’est cette technique qui caractérise essentiellement les types de mouvements vifs et agités.
Par ailleurs, Ligeti crée dans les parties instrumentales une richesse sonore d’une grande hétérogénéité, par exemple avec un pizzicato proche du bruit aux cordes, alors que les cuivres jouent avec sourdine en timbres métalliques ou en sons naturels. Des instruments inhabituels contribuent à élargir le champ sonore : ainsi de l’intervention, au début du deuxième mouvement, d’un ocarina-alto et d’une flûte-lotus (« jazzo-flûte ») au cours d’un échange nostalgique avec le piccolo et le basson.
György Ligeti : Concerto pour piano et orchestre – Le répertoire standard du piano au XXe siècle
Ligeti va chercher son matériau musical dans les différents modes dont on dispose, comme par exemple les gammes par ton, ou les modes pentatoniques, tout en y mélangeant en outre souvent d’autres sortes d’échelles. Le résultat amène à des types de sonorités très particulières qui, utilisées avec des expressions rythmiques complexes et des mélanges harmoniques originaux, produisent un effet sonore proche de l’illusionisme. Dans leur mélange sonore, ces éléments font naître des connexions très particulières entre les motifs individuels joués aux différents instruments, dont on cherchera une trace écrite sans la trouver dans la partition, car seule pourtant la perception en émerge.
Les phénomènes d’illusions musicales, qui m’importent tellement, ne constituent pas un but en soi, mais relèvent plutôt des fondements de mon comportement esthétique. Je donne la primauté à des formes musicales tenant moins du processus que de l’artefact : la musique en tant que « gel » du temps, en, tant qu’objet évoqué dans notre espace imaginaire, dans notre représentation, en tant que création qui de fait ne se développe pas dans l’écoulement du temps, mais, qui, grâce à l’imagination, est présente dans la concomitance de tous ses instants. Bannir le temps, abroger son écoulement, l’inclure dans le Maintenant de l’instant, voilà le but premier de ma composition. – György Ligeti
Outre le Concerto pour piano et orchestre, on pourra aussi entendre à Paris le 10 mai 2019, également de Ligeti, le Concerto pour violon et Orchestre ainsi que son Concerto hambourgeois pour cor et orchestre de chambre. Par ailleurs, l’Orchestre philharmonique de la Ville de Birmingham joue le 9 mai 2019 le Concert Românesc, tandis que l’opéra de Ligeti Le grand macabre célèbre sa première le 10 mai 2019 à la Elbphilharmonie de Hambourg.